Hommage à André Charlet

Le père s’en est allé…

Trois jours après avoir pris congé de son premier et charismatique président, André Schertenleib, décédé à Prilly à l’âge de 94 ans, le Chœur Pro Arte de Lausanne pleure André Charlet.

Fondateur du chœur en 1947, au côté du pasteur Albert Girardet, alors aumônier de l’Ecole  normale, André Charlet dirigea son ensemble 52 ans de manière ininterrompue, ce qui en soi est déjà peu banal.

Les nombreux hommages qui sont rendus au musicien relèvent le rayonnement extraordinaire d’André Charlet  dans le paysage culturel romand ; allusion est faite le plus souvent à ce qui demeurera le plus pérenne et le plus spectaculaire de son action, les Schubertiades, une idée à laquelle Espace 2, sous la houlette inspirée de son créateur, a su donner le retentissement que l’on connaît, permettant l’approche de la musique classique par un public toujours plus nombreux.

D’autres réalisations issues de sa créativité débordante demeureront dans les mémoires, telles Tant chante-t-on Noël, célébrations remplissant la Cathédrale de Lausanne d’une foule compacte, debout, participative et heureuse de chanter.

Ce rôle de passeur, les quelque cinq cents choristes qui ont appartenu au CPAL depuis sa création, l’ont vécu en permanence au contact d’un chef dont l’enthousiasme et l’engagement, reflets de sa passion, parvenaient toujours à contaminer le chœur ; une partition de Doret ou d’Hemmerling était abordée avec le même respect qu’une œuvre de Bach ou de Schubert.

Son humilité face à la musique, mais aussi son intuition et sa très grande culture, lui ont permis de toucher avec le même bonheur tous le publics : les amateurs comme les professionnels, les orchestres comme les chorales, les néophytes comme les musicologues.

Enfin, les privilégiés qui ont eu la chance de vivre la musique sous sa direction ont tous pu apprécier son sens de la métaphore, mis à profit pour que la musique dépasse le simple exercice technique, pour qu’elle devienne habitée par des sentiments, pour qu’elle ait une âme … à l’exemple des explications qui furent nécessaires aux musiciens chinois de Pékin pour comprendre, en l’absence de tout repère culturel et biblique, la mort et la résurrection du Christ dans le Requiem de Mozart.

Les derniers mots, admirables, appartiendront à Julien-François Zbinden, musicien, fidèle ami du Chœur Pro Arte, des mots tirés d’une récente lettre adressée à André Charlet et qui mettent en valeur une dernière facette de ce père que nous avons perdu, la défense de la musique contemporaine.

… « Je puis tout autant t’assurer que ce que je te dois au cours de ma vie de musicien, est immense, que j’en reste débiteur par le nombre d’exécutions inspirées que tu as accordées à mes œuvres, par les périlleuses créations de musique contemporaine suisse ou étrangère, assurées vaillamment et avec ton enthousiasme aussi communicatif que légendaire, par le Chœur de la Radio Suisse Romande dont tu as fait un ensemble de première grandeur. » …


À son épouse, à ses enfants, à ses proches vont nos condoléances émues.

26 février 2014